Alors que le gouvernement français annonce le lancement d’une application pour les attestations de déplacement dérogatoire, de nombreuses questions se posent. En particulier pourquoi après avoir proposé la dérogation papier ou électronique, le gouvernement a choisi papier ? Et pourquoi faut-il une dérogation électronique pour toute la période jusqu’à la fin du confinement ?
« liberté, égalité, fraternité », le premier mot semble bien incompatible avec le confinement. Et de fait il l’est. C’est bien pourquoi le gouvernement a vite oublié les solutions de geo-fencing utilisés dans certains pays (cf Taiwan). Ces applications sont dignes du bracelet électronique qui est d’ailleurs utilisé pour des personnes en quarantaine à Hong Kong (Cf. Hong Kong ). Interdire le déplacement des personnes est déjà très limite, mais les tracker individuellement pose de nombreux problèmes qui dépassent largement la RGPD (lien). C’est donc tout naturellement que la France a choisi une solution de déclaration sur l’honneur.
La liberté un droit fondamental
Seulement voilà, le Français est latin. Et la raison d’être du confinement n’a pas été compris par la majorité des gens. Du coup des articles avec les pires excuses commencent à fleurir dans les journaux et sur Internet. Dans de très nombreux pays, l’idée de compter sur la responsabilité des gens a fait long feu. Et que cela soit l’Italie ou l’Espagne, la population dans sa globalité le paye au prix fort.
Après les données de géolocalisation anonymisé, le déplacement personnalisé
L’Europe a réagi en cherchant à valider la réalité effective du confinement. Elle a donc demandé à un opérateur téléphonique par pays de fournir des données anonymisées sur les déplacement des téléphones. Ne voulant pas sembler être en reste Google vient de diffuser les données pour 131 pays en ce 3 avril 2020 (Cf. blog Google). Dans tous les cas, les résultats sont édifiants. Il est donc logique que les gouvernements veulent passer à la version supérieure, le papier (cf. dérogation au 4 avril 2020) ayant montré ses limites.
Déjà beaucoup, mais pourquoi pas plus et surtout mieux
Dans l’état des choses, ce que nous savons est que nous devrons remplir en ligne notre demande de dérogation et aurons en retour un QR-code. Les services de police et de gendarmerie pourront scanner ce QR-code pour valider la dérogation. Il a également été dit que l’heure de renseignement de la dérogation sera également connue. Potentiellement, il y a également le contrôle du nombre de dérogation sur une période donnée. Question vie privée, cette solution fait voler en éclat plusieurs barrières de protection de la vie privée et de la liberté. Et la question est de savoir si l’application n’ira pas plus loin ! Nous entendons beaucoup parler de ce que fait Singapour. Leur application conserve en mémoire l’ensemble des téléphones avec lesquels il a pu se connecter en Bluetooth. Bluetooth étant un protocole radio d’assez faible portée (100m en champ libre, dans le 30m dans les bâtiments), cela permet de savoir combien de personnes ont été rencontrées et qui elles sont. L’idée est que quand quelqu’un est reconnu malade du COVID 19, l’ensemble des téléphones qu’il a rencontré soient avertis de sorte à ce que les gens se confinent. Nous avons là un cas d’école de question éthique avec cette question difficile : à quel moment les risques d’effet secondaire doivent faire abandonner la solution ?
Confinement 4.0
La discipline sociale et la probité font parti de la culture de nombreux pays asiatiques. L’idée de l’auto-confinement en cas de risque d’avoir été infecté marche assez bien dans ces pays. Il n’est pas sûr que cela sera le cas dans les pays latin, et donc en France. Il nous faut donc inventer un autre type de confinement, un confinement 4.0 ? Et vu tout ce que nous venons de rappeler sur le caractère latin des Français, ce confinement intelligent doit également intégrer une dimension de sanction en cas de non-respect des règles, à l’instar des radars routiers.
Confinement 4.0 : le confinement intelligent / le smart-lockdown
La raison du confinement est de limiter les contacts entre les personnes pour réduire les risques de propagation rapide de la maladie. Ce qui est intéressant est donc bien de limiter le nombre de personnes que chacun rencontre que cela soit au 1er, 2nd, 3e …. degrés. Une rencontre au 3e degré correspond à dire que vous avez rencontré une personne qui elle-même a rencontré une personne qui avait rencontré une autre personne. Le nombre de personnes que nous pouvons rencontrer et le degré jusqu’au quel il faut remonter dépendent de nombreux paramètres. Il y a la capacité du virus à infecter une nouvelle personne. Il y a aussi le temps passé avec les autres personnes pour ne citer que deux paramètres. Fondamentalement, il s’agit de calculer le degré d’exposition au virus ou, dit autrement, la probabilité d’avoir été contaminé. Une application pourrait donc totaliser un quota pondéré de personnes rencontrées et finalement interdire tout contact avec les autres puis tout déplacement en fonction du risque de contamination pris. Le reste du temps nous pourrions nous déplacer mais en étant alerté du pourcentage de risque d’être contaminé que nous prenons.
notes (mis à jours au 4 avril 2020)
Ajout : Dès aujourd’hui, Google et Apple ont toutes les données qu’il faut pour définir les coefficient de l’équation de risque d’infection. Il leur est possible de faire une application qui n’est plus à calculer un quota mais à réellement calculer la probabilité d’infection et la mettre à jour en temps réel. Avec une telle application, les gens pourraient choisir le risque d’exposition qu’ils veulent prendre et les pays fixer un risque maximum.